Les problèmes de voiries et de mobilité sont manifestement des problèmes récurrents de tous temps..

L’Avenir du Luxembourg du 11 décembre 1907 nous en apporte une belle preuve.

Voyez plutôt.

Au pays de Mabompré

« On nous écrit :

Monsieur le Rédacteur,

Depuis quelques temps déjà, il se débat dans les colonnes de l’Avenir [i] une question, à propos de la voirie. Voudriez-vous permettre à un de vos lecteurs assidus, de répéter à ce sujet le « paulo majors canamus »[ii] c’est-à-dire ce qui se passe ou plutôt devrait se passer sur la voirie de son pays ?

Ma foi, il se passe… qu’il ne se passe rien. Savez-vous que la commune de Mabompré (1200 âmes, 4 sections [iii], 3 paroisses) est située, pour la section la plus éloignée à 16 km. De toute station de chemin de fer [iv] ?

Concevez-vous que demandant depuis longtemps et à cor et à cri le passage d’une malle-poste[v], pour nous tirer de notre isolement, nous nous heurtons coup sur coup à un refus inexplicable ?

A côté de chez nous les braves gens de Compogne sont logés à la même enseigne ; eux aussi voient leurs demandes répétées toujours rejetées grâce à de ténébreuses machinations. Et pourtant nous sommes belges, contribuables, électeurs.

N’y aura-t-il aucun de nos commettants soit député, conseiller provincial ou même sénateur qui voudra enfin prendre la chose à cœur ? Ne semble-t-il pas qu’on devrait d’autant plus tôt s’occuper de la question qu’il y a plus longtemps que l’on demande et que l’on attend ?

Maintenant un petit conseil.

Au lieu de se chicaner, MM. Les Commissaires piqueurs[vi] et autres agents de la voirie, pourraient bien venir jusque chez nous ! Mais de grâce, pas un jour de foire ni par un temps froid – de crainte d’une nouvelle polémique.

Ils pourraient se rendre compte de visu ce qui en ces villages sert de chemin pour se rendre à l’école, ou à l’église, ou au cimetière. C’est une espèce de passage coupé à tout moment par les cours d’eau venant du trop plein des fontaines (et quelles fontaines) et des égouts du village.

Et parce que, sans doute, depuis toujours on fait ainsi, on continue de laisser aller les choses, et l’an passé, en quinze jours de temps, mourraient dix à douze personnes, enfants surtout, parmi une population de 400 habitants [vii].

Signé DIXI.

— Notes et références —

[i] LAvenir du Luxembourg est un quotidien belge catholique francophone de la province de Luxembourg fondé en 1894. Bien qu’il prêche le rassemblement de tous les catholiques, L’Avenir du Luxembourg diffuse des idées conservatrices.

En 1897, une société coopérative d’édition dénommée « La presse luxembourgeoise » est mise en place afin de gérer le quotidien. Un des dirigeants de cette société coopérative d’édition, Godefroid Kurth, influence le contenu du journal dans un sens démocrate-chrétien.

[ii] L’expression latine paulo maiora canamus, traduite littéralement, signifie chantons des choses un peu plus élevées. L’expression est citée pour passer d’arguments frivoles à des sujets plus intéressants, ou d’un sujet douloureux à un sujet plus consolant. Cette expression est de Virgile (Les Bucoliques ou Eglogues).

[iii] Mabompré, Vellereux, Engreux et Bonnerue

[iv] Bastogne ou la gare du vicinal à Houffalize.

[v] La malle-poste était une voiture hippomobile destinée à l’origine au transport des dépêches et du courrier en général, apparue en France vers 1800. La malle-poste peut transporter, en plus du courrier, des passagers. C’est donc une voiture plus lourde, fermée, à quatre roues, suspendue sur des ressorts, tirée par quatre ou cinq chevaux. La partie avant, le cabriolet, reçoit le cocher et un passager à côté de lui. Dans la partie centrale, le coupé, prennent place trois voyageurs. La partie arrière est la malle réservée au courrier. Source Wikipedia.

[vi] Le piqueur cantonnier est un agent préposé par l’administration ou par l’entrepreneur pour recevoir par compte les matériaux et en tenir marquer les journées des ouvriers, veiller à l’emploi de leur temps et « piquer » sur son carnet ceux qui s ‘absentent pendant les heures du travail afin de pouvoir leur faire subir des retenues proportionnelles. Source : Jean Bernard Tarbé de Vauxclairs , Dictionnaire des travaux publics, p. 369

[vii] Il s’agit de l’épidémie de stomatite et de variole de décembre 1906 qui provoqua en effet beaucoup de décès dans la commune de Mabompré et dans les communes avoisinnantes. Voir l’article Epidémie en Ardenne (1906) du 3 novembre 2020 Epidémie en Ardenne (1906).

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