Deux Chasseurs Ardennais de la 4 Cie, les soldats Georges Mairy [1] et Joseph Crouquet, tous deux âgés de 24 ans, sont tombés au combat à Trois-Ponts le 10 mai 1940


Les livres consacrés aux Chasseurs Ardennais et à la campagne des 18 jours sont, pour le moins, laconiques au sujet de ces combat.

La place de Trois-ponts est d’une certaine importance sur la route de l’invasion allemande. Les ordres de destructions et d’obstructions ont été réalisés. Les ponts sur l’Amblève ont sauté.

Cependant, les ordres de retraite du général Keyaerts ne semble pas avoir atteint les soldats en toute première ligne.

Les témoignages ci-dessous sont repris de la Petite Gazette [2] et reproduit avec l’aimable autorisation de .son éditeur, M. René Henry.

Monsieur V. P. [3], d’Esneux, répond à l’appel lancé par M. S. en nous confiant ce dont il se souvient de ce que racontait son papa, ancien du 3ChA :

« Après la campagne de mai 40, nous habitions Trois-Ponts et papa, avec d’autres Chasseurs Ardennais, parlait souvent des événements de la guerre. J’avais alors 10 ans et voici ce que j’en ai retenu au sujet des combats de Trois-Ponts.

Le fortin, à droite de la route vers Grand-Halleux (aujourd’hui, il y a dans les environs immédiats de ce lieu un grand magasin et un garage) tirait en direction de la route de Wanne et les Allemands étaient bloqués au tournant, au-dessus de la côte, derrière la gare de Trois-Ponts. Les Allemands ont amené un canon à tir direct et ont réduit le fortin au silence en tirant dans l’embouchure de tir du fortin. Là c’est un peu flou dans ma mémoire, mais les gaz produits par l’arme du fortin y rendaient l’air irrespirable et les soldats en sortaient ou étaient sortis quand l’obus allemand a explosé dans le fortin.

La suite est tellement vague dans mon esprit que je ne peux rien en dire. Il y a eu d’autres tirs parce qu’une maison en briques rouges un peu avant le fortin a porté longtemps après la guerre des traces d’impacts de tirs ou d’éclats d’obus et là aussi c’est flou, mais il doit y avoir eu un civil blessé dans cette maison.

J’ai le souvenir d’un autre fait sur la route de Grume, dans une villa quatre étages, à droite en montant. Un sergent, dont papa et ses anciens compagnons d’armes citaient le nom mais que j’ai oublié, a tenu en échec les Allemands venant de Stavelot et voulant traverser l’Amblève. Il les laissait avancer jusqu’au milieu de l’eau puis tirait. Il changeait d’étage après chaque tir. Il a fini par être blessé puis capturé.« 

Monsieur J. P., de Tiff, complète et illustre les informations reçues.

« Dans une toute récente Petite Gazette, M. V.P., d’Esneux, parle d’un fortin à Trois-Ponts. Il s’agit de S8 (dénomination officielle) S = Salm. Avec la présence sympathique de l’habitant concerné, je l’ai visité car il est dans le fond de son jardin.« 

« J’allais avoir 23 ans. Nous étions en position à Trois-Ponts en mai 40. Depuis la nuit du 9 au 10 mai, nous étions en alerte. Le vendredi 10 mai, c’est jour de marché à Trois-Ponts. Les obstructions ont été réalisées tôt dans la matinée comme de coutume depuis la mobilisation de septembre 1939.

Il y avait des gardes au tunnel du chemin de fer et des positions de défense sur les routes.  A Trois-Ponts, il y a plusieurs fortins…  Le major de Neef que nous surnommions « Ambiorix » était à la tête du bataillon (le 2e ) et le commandant  Hoffelt dirigeait notre 4e compagnie… Il y avait également le lieutenant Lavachery…

Nous étions relevés toutes les deux heures.

J’étais tireur de FM (fusil mitrailleur) et faisais équipe avec Georges Mairy, en position en contrebas du fortin de Ristonvenne, sur la route de Grand Halleux.Dans l’après-midi du 10 mai 40, les Allemands se sont pointés, descendant à vélo sur la route de Wanne. Ils furent accueillis par des tirs. Aussitôt, ils se retirèrent. Puis, plus rien !

Pendant la nuit, on entendait une rumeur par-dessus les bois; de temps en temps, on distinguait des signaux lumineux rouges, des bois de part et d’autre  de la vallée… 

Alors qu’on recevait toutes les deux heures des instructions du QG du 3e Chasseur Ardennais installé à Basse-Bodeux, depuis la veille, on n’avait plus rien vu venir. Le lendemain, toujours sans nouvelles, après nous être concertés, Georges Mairy se propose de s’enquérir auprès du QG. Alors que nous allions être relevés, Georges Mairy quitta la position pour Basse-Bodeux en passant par le fortin de Ristonvenne. A ce moment, une explosion secoua le fortin.

Peu après, une deuxième explosion toucha le petit char à l’arrière du fortin, plus haut dans la tranchée. Puis, le calme revint… Je m’enhardis de m’échapper en passant par le fortin, Georges Mairy de Barvaux et Joseph Crouquet de Vissoule étaient inanimés, l’explosion les avait emportés…

Source : M. J.B., un des derniers témoins de mai 40 (en 2004).

Trois-Ponts – Panorama

Panorama de Trois-Ponts à la confluence de la Salm avec l’Amblève – Viaduc ferroviaire sur l’Amblève

Emplacement des fortins: 1 : Fortin de Ristonvenne, 2 : Fortin avenue Lejeune, 3 : Fortin ruisseau Baleur, 4 : Fortin chemin de Brume, 5 : Fortin de Faravenne.

– – – Notes et références – – –

[1] Sur Georges Mairy, lire  Terre de Durbuy n° 129, B. PoloméB. MarnetteJ.-P. GonayPh. Bastin,  Asbl Terre de Durbuy, 1 sept. 2014 – 61 pages

[2] https://lapetitegazette.net/2016/05/17/en-guerre-avec-le-3e-chasseurs-ardennais/

[3] Seules les initiales ont été conservées, à la demande de M. Henry.

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